Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
7 juin 2010 1 07 /06 /juin /2010 14:11

L'autonomie du peuple Triqui continue d'avancer "... nous vous demandons de ne pas abandonner vos efforts et votre solidarité, votre présence est imprescriptible pour éviter la barbarie.... nous vous appelons tous et toutes à ne pas rêver mais à une chose plus simple : nous vous appelons à vous réveiller." (Déclaration de la municipalité
autonome de San Juan de Copala)
 
Le 27 avril dernier, la "caravane humanitaire internationale pour la paix" en route vers la municipalité de San Juan de Copala (Etat de Oaxaca) au Mexique était violemment attaqué par un groupe de paramilitaires : l’UBISORT (Union du Bien-être Social dans
la Région Triqui). L’agression provoqua 2 morts, la mexicaine Alberta Beatriz Cariño (35 ans) de l’Association Civile CACTUS (Centre de Soutien Communautaire Travaillant Unis) et le finlandais Jyri Antero Jaakkola (25 ans), ainsi que plusieurs blessés parmi lesquels des membres de l'organisation VOCAL (Voix Oaxaqueniennes pour la Construction de
l’Autonomie et la liberté) et 2 journalistes indépendants de "Contralinea".
 
Les autorités mexicaines ne paraissent pas très préoccupées par ces assassinats et agressions, pas plus par l’impossibilité pour la police estatale d’entrer sur le territoire pendant un certain temps apres les événements du fait du refus de l'UBISORT qui semble le "maître" du territoire. Le gouverneur de l’Etat de Oaxaca, Ulises Ruiz Ortiz, n’a pas ouvert d’enquête à proprement parlé et s’est contenté de déclarations
pathétiques dont il a le secret : «C’est incompréhensible qu’un international puisse se balader dans cette zone, nous allons réviser ses papiers... il faudrait encourager l'expulsion d'étrangers qui apportent des problèmes» ; «Il n'entre pas de policiers (fédéraux, de l'état ou municipaux) dans la zone du fait de son haut degré de conflit»,
légitimisant ainsi la présence des militaires et paramilitaires dans cette région du Nord Ouest de l'Etat. Le gouvernement fédéral n'est pas plus déterminé pour apaiser le conflit et assurer le bien-être des habitant-es mais le Procureur Général de la République et le Ministère Public Fédéral ont néanmoins ouvert une enquête le 01 mai pour les délits d'homicides et lésions ainsi que la détention illégale d'armes à feu et explosifs.
 
L’ OACNUDH (Bureau des Droits humains de l'ONU) semble encore la plus préoccupée par le cas de Copala ayant dénoncé auprès du président de la république mexicaine, Felipe Calderon, l’impossibilité de travailler et de circuler librement pour les observateurs de droits humains et l’ impunité présente dans le pays. Elle a lancé un appel pour que se réalise une "enquête impartiale, expéditive et effective des faits pour un procès et une sanction des personnes responsables". Elle appelle aussi "les autorités à prendre les mesures pour diminuer (hic!) la violence dans la zone triqui et assurer le
respect des droits des peuples et communautés indigènes" comme celui du droit à l'autodétermination reconnu dans la Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Peuples Indigènes. La Cour Interaméricaine a quant-à elle aussi ouvert un dossier sur San Juan de Copala.
 
Les agressions s'enchaînent Cette attaque de fin avril n’était pas malheureusement isolée et singulière car les agressions, comme pressentis par les habitant-es de la
municipalité, se sont poursuivies depuis 1 mois. Le 14
mai, Margarita Lopez Martinez et Susana Martinez ont été séquestrées et menacées pendant 2h ; le jour suivant, 12 habitant-es de Copala avec parmi eux des enfants de 1 à 4 ans,ont été séquestrés pendant une nuit où ils et elles furent frappé-es, menacé-es et privé-es de tous les vivres et biens qu'ils apportaient dans leurs communautés. Le 20 mai, un des principaux "leader" et acteur de cette commune indépendante, Timoteo Alejandro Ramírez (44
ans), et son épouse Cleriberta Castro (35 ans) furent assassinés.
 
Il semble important d’informer que la recrudescence des agressions contre les communautes de San Juan de Copala se fait sentir depuis octobre 2009 avec une intensification de la violence armée dans la zone et la mise en place d'un blocus de la part des paramilitaires de l'UBISORT. L'UBISORT est un groupe armé d'habitant-es de Copala qui est opposé au municipalite autonome et qui est instrumentalisé et financé par le PRI (Parti Révolutionnaire Institutionnel), parti au pouvoir à Oaxaca. De
multiples brutalités, menaces et affaires mortuaires (21 assassinats de novembre à mai) sont à relever depuis 7 mois comme les 12 personnes de la municipalite de San Miguel de Copala (région Basse Triqui) tuées fin janvier de cette année car “elles ne voulaient pas soutenir l’UBISORT” selon Victor Castillo, habitant de Copala.
 
La zone, en plus des agressions perpétuelles subies, s’est vu coupée des nécessités de base comme les alimentations en eau, électricité, télephone et en partie des vivres ainsi que l’accès à l’éducation et la santé, vu le blocus agencé depuis plusieurs mois. Il est de plus en plus difficile pour les habitant-es de la zone de pouvoir entrer et sortir de chez eux sans risquer de mettre en danger leur vie.
 
C’est une véritable guerre de contrôle du territoire, entamé depuis les années 70, qui s’est intensifié ces derniers temps avec une nouvelle (para)militarisation de la zone en vue de démanteler la municipalité autonome de San Juan de Copala (32 communautés), autodéterminée par le MULTI (Mouvement d'Unificatin et de Lutte Triqui Indépendant) et des habitant-es le 01 janvier 2007. “Notre autonomie se développe sur nos formes propres d'us et coutumes et notre propre politique, sans partis et sans religion autoritaire. L'autonomie c'est sauver notre propre culture, notre langue, nos vêtements traditionnels. Pour nous, l'autonomie est simplement être comme nous sommes, cheminer comme nous cheminons, avec notre manière d'être”. (Conseil autonome de San Juan Copala)
Cet autogouvernement, sur des bases d’organisations communautaires indigènes (assemblée basée sur le consensus, travail collectif, radio autogérée...), se développe via ses propres ressources indépendamment de l'Etat. Il met en place une forme politique toute autre que celles de partis “conventionnels” et est en ce sens un danger de déstabilisation politique pour le gouvernement.
 
Nouvelle caravane
Dans ce climat des plus réjouissants et pacifique, est convoqué par les habitant-es de Copala une seconde caravane d'observation et de solidarité - la "Caravane Bety Cariño et Jyri Jaakkola"- qui partira le 7 juin depuis la ville de Mexico pour arriver le 08 à San Juan de Copala. Elle a pour objectifs d'acheminer de la nourriture aux habitant-es, ainsi que de rompre le cercle paramilitaire de l'Etat et exiger le démantèlement des groupes paramilitaires dans la région ; poser les bases pour construire la paix et la justice que les peuples Triqui nécessitent ; fortifier le processus de l'autonomie et de démocratie communautaire ; et dénoncer envers la société civile nationale et internationale la situation de violence et de siege qui se vit dans la municipalite autonome.
 
Alejandro Encinas Rodríguez, député mexicain, a assuré qu'il accompagnerait la caravane avec son groupe parlementaire du PRD (Parti Révolutionnaire Démocratique) et servirait de bouclier humain si besoin, alors que Evencio Nicolas Martinez Ramirez, le secrétaire du gouvernement de Oaxaca, a déclaré par voie de presse“ qu’il n y aucune condition propice pour qu’arrive cette nouvelle caravane, et donc que les intégrants
prennent le risque de mise en danger de leur sécurité”.
 
 
Agir et Ian
 
 
Pour se solidariser depuis l'outre-Mexique
- libertadparacopala@gmail.com

Partager cet article
Repost0

commentaires