LE FIGARO
ECONOMIE
Vendredi 19 Février 2010
économie
Les syndicats français font des salaires une revendication prioritaire de 2010
2010 sera en France une année de fortes tensions sur les
salaires. Tout le monde, des organisations patronales aux centrales syndicales en passant par le gouvernement, s'accorde à le dire. « Les
négociations annuelles obligatoires sur les salaires risquent d'être plus tendues qu'en 2009 » , confirme Antoine Richard, spécialiste des rémunérations au sein de l'association
de DRH Entreprises et Personnel. « Il y a déjà pas mal de conflits , remarque Marcel Grignard, le secrétaire général adjoint de la CFDT. Les salariés sont à cran après
une année 2009 très difficile et les négociations salariales, quand elles vont au bout, débouchent au mieux sur des augmentations de l'ordre de + 1,5 % à + 2 %. » Si
l'on en croit les estimations du cabinet Hewitt Associates, les salaires devraient augmenter cette année de 2,6 %. Soit l'une des plus basses progressions de la décennie passée.
Rares seront les entreprises qui proposeront, comme EDF, une progression de la masse salariale de + 4,4 % cette année. « Cette
annonce a fait beaucoup de mal et suscité beaucoup d'espoir chez les salariés » , estime d'ailleurs un conseiller en rémunération. Moins généreuses, BNP Paribas a annoncé des
augmentations salariales de 1 % et PSA Peugeot Citroën de 1,9 %.
« Le salaire est
souvent le révélateur d'autres problèmes dans l'entreprise , note Antoine Richard, qui cite en exemple le conflit en cours chez Ikea. Le corps social sort éreinté de la récession. Tous
les intérimaires sont partis et les salariés en CDI ont supporté le gros de la crise. Ils peuvent réclamer un geste sur les salaires d'autant plus que les entreprises ont annoncé des budgets
salariaux plus faibles que les années précédentes. »
Smic à 1 600 euros brut
Pour Xavier Lacoste, directeur général du groupe Altedia qui conseille tout le CAC 40, deux facteurs renforcent les tensions actuelles sur les salaires : les bons résultats des banques qui recommencent à distribuer des bonus et l'incertitude sur la date et l'ampleur de la sortie de crise. « Les entreprises ne savent pas si elles vont pouvoir conclure des accords tant l'écart est grand entre ce qu'elles peuvent offrir et les revendications des syndicats » , reconnaît-il. « Toutes les annonces précipitées sur la sortie de crise donnent l'impression qu'il y a du grain à moudre et que les entreprises ne vont pas si mal que cela » , abonde Pierre Ferracci, le président du groupe Alpha.
Le débat à venir sur les retraites devrait contribuer à tendre encore les relations sociales. « Les syndicats vont essayer d'obtenir des
compensations en termes de pouvoir d'achat avant que les mauvaises nouvelles ne tombent » , prévoit Pierre Ferracci, qui anticipe un « premier trimestre
tendu » . Au gouvernement, on craint la rentrée de septembre. « Ce sera difficile toute l'année, du moins tant que les restructurations n'auront pas repris ou que la croissance
n'aura pas redémarré » , nuance un expert. À la CGT, Bernard Thibault réclame d'ores et déjà un smic brut à 1 600 euros, soit une
hausse de 20 % par rapport à aujourd'hui.
Marc Landré